Il y aurait deux poids deux mesures. Ces derniers jours, deux femmes de confession musulmanes ont été agressées. L’une a ensuite fait une fausse couche sans qu’il soit prouvé à ce stade que cet accident soit dû à l’agression.
Comment sait-on qu’elles étaient musulmanes ? Pourquoi pense-t-on qu’elles ont été agressées à cause de leur religion ?
Elles portaient toutes les deux le voile. C’est tout, rien de plus que leur témoignage.
« La prudence est de mise » commente une blogueuse philosophe. Sacrée prudence, personne ou presque n’en parle. La France médiatique est pourtant intoxiquée aux faits divers. Quand ceux-ci portent une quelconque valeur symbolique, c’est habituellement la curée, l’overdose.
Là, rien, ou presque. L’accusation débouche très vite: si on n’en parle pas assez, c’est parce qu’il s’agit de femmes voilées.
Notre blogueuse philosophe s’envole et s’emballe. Elle s’indigne qu’on ait davantage parlé de Clément Méric que de ces deux agressions: « Clément n’était pas une femme voilée. » La comparaison est assez inopérante, franchement curieuse. On en connaissait bien davantage sur les circonstances de la mort de Clément Méric, dont l’agression eut lieu en public; et Clément Méric est … mort.
Notre blogueuse dénonce un parti pris des « féministes ». La charge est trop globale. « C’est comme si, parce que cette femme était voilée, elle ne mériterait pas notre compassion et notre énergie à défendre ses droits à la dignité et à la sécurité. » Les violences faites aux femmes sont malheureusement nombreuses, très nombreuses. Je n’ai pas souvenir qu’une agression « lambda » ait déclenché pétitions médiatiques, tribunes scandalisées et overdose télévisée. Il faut du meurtre, du sang, du graveleux. La banale violence faite aux personnes n’émeut plus. L’excellent Laurent Mucchielli commentait ainsi, en janvier 2012: « Il est normal que le débat public s’interroge sur les faits qui sortent de l’ordinaire. »
Que dire donc ces agressions ? Qu’elles sont tristes et inacceptables; qu’elles témoignent d’une islamophobie rampante. Qu’elles méritent « plus » ou « autant » que d’autres faits divers ? Pas sûr.
Mise à jour: Le ministre de l’intérieur Manuel Valls a reçu les deux victimes jeudi, veille de la publication de cet article. L’information n’est arrivée que plus tard.
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